La peinture aborigène contemporaine

Embarquons pour un voyage à travers le monde envoûtant de l’Art Aborigène aux couleurs chatoyantes et symboles complexes qui racontent des histoires ancestrales. Nous examinerons les conditions de vie des Aborigènes pour mieux comprendre la raison d’être de leurs expressions artistiques.
Nous explorerons le lien profond qui unit l’art, la terre et l’esprit du ‘Dreamtime’, le mythe fondateur des Aborigènes d’Australie. Nous découvrirons comment une peinture aux origines millénaires et paradoxalement, résolument moderne, a su s’imposer sur la scène artistique internationale. Aujourd’hui acte de résistance identitaire, ces peintures chargées de sens expriment une spiritualité délicate et sophistiquée que nous tenterons de décoder à travers l’analyse d’une œuvre intitulée ‘Yilpinji’ ou Magic Love Song.

Un Art qui ébauche une réconciliation de l’Homme avec la nature et avec lui-même
André Breton

Intervenant : Thierry Thivisol
Anthropologue
Globe trotter – Australianiste
Spécialiste en art aborigène
thivisolthierry@gmail.com

L’Australie

J’ai vécu 17 ans en Australie à Melbourne tout d’abord, grande ville du Sud, et ensuite j’ai déménagé à Alice Springs en plein désert où se trouve les Aborigènes qui n’ont pas encore de relations suivies avec les blancs.


L’Australie
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

L’Australie est un très grand pays 4 000 km de l’est à l’ouest et 3 000 km du Nord au Sud. C’est essentiellement du désert avec une population de 25 millions d’habitants qui est répartie surtout dans les grandes villes.


Vue aérienne du Bush
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Sur cette vue aérienne on voit la prépondérance du Spinifex, une herbe qui couvre 22 % du territoire australien.


Carte des langues aborigènes
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Cette carte est la carte des langues aborigènes. Il y en a à peu près 250. Les territoires côtiers sont très petits parce qu’ils étaient très peuplés et au centre les territoires sont plus grands parce que moins peuplés. Au centre ce sont les Arrernte en gris, leur territoire fait 500 km entre le Nord et le Sud. J’ai travaillé pour le gouvernement australien pour recenser un territoire de la taille de la région PACA qui comptait 2 500 habitants.
Voir : Les langues aborigènes d’Australie.

La colonisation

En 1770, L’Endeavour commandé par le capitaine Cook, arrive à Sydney. Quelques années plus tard, en 1788 le capitaine Phillip arrive à son tour devant Sydney et il hisse le drapeau anglais.


Arthur Phillip fonde la ville de Port Jackson, future Sydney, le 26 janvier 1788. Huile sur toile d’A. M. Talmage. XIXe siècle. Commonwealth Club, Londres
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Mais cela ne s’est pas passé exactement de cette façon. Une dizaine de jours après son arrivée dans cette même baie, apparaissent deux bateaux français commandés par l’amiral de La Pérouse. Les Anglais alors hissent rapidement leur drapeau. Auparavant le capitaine Cook avait baptisé l’Australie “Terra nullius” (sans êtres humains). En fait les Français sont là pour reposer leurs équipages car ils venaient des îles Cook où ils avaient été attaqués par les indigènes. (Il existe encore un quartier de Sydney qui s’appelle La Pérouse).
Après la perte de leurs colonies d’Amérique du Nord, les Anglais installent en Australie une colonie pénitentiaire. Progressivement ils prennent possession des terres, s’éloignent de la côte et chassent les indigènes.
L’histoire de la colonisation est surtout une histoire de dépossession.

Les Aborigènes
La plupart des spécialistes estiment que les Aborigènes australiens auraient atteint l’Australie ou, pour être précis, le protocontinent «Sahul», il y a entre 40 000 et 50 000 ans, durant l’ère glaciaire.
Les préhistoriens affirment que les premiers habitants sont venus du Sunda, protocontinent qui regroupait l’Indonésie et l’Asie du Sud-Est. Les immigrants ont vraisemblablement débarqué sur la côte Nord par bateaux, on ignore s’il s’agissait de radeaux de fortune ou de navires élaborés.
A l’arrivée des européens, les Aborigènes ont eu très peur dans un premier temps, car ils pensaient qu’ils étaient des morts-vivants. En effet après la mort la peau se dépigmente et devient progressivement blanche.
Les Aborigènes ont une culture très différente de la nôtre. Pour eux on ne possède pas la terre, c’est la terre qui nous possède. Ils pensaient que les blancs n’étaient que de passage sur leur terre et ils ne se sont pas rendu compte qu’ils étaient là pour rester.


Le village aborigène le plus isolé de l’Australie

Le contact avec les Aborigènes n’est pas facile ils ont pas un visage particulièrement avenant, qui ne correspond pas à nos canons de beauté. Il faut aller au-delà pour créer des contacts. Par contre ils ne sont pas du tout racistes la couleur de la peau n’a aucune importance et si on montre de l’intérêt pour leur culture on est bien accueilli.


Artiste aborigène
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Voir l’histoire de Narcisse Pélissier qui a vécu 15 ans parmi eux.

Le dingo, qui est un descendant du loup d’Asie, est le seul animal qu’ils ont domestiqué.


Dingo
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Comment les Aborigènes vivent dans le bush ?
Ce qu’ils mangent :
Ils consomment des graines de céréales pour faire de la farine (Wattleseed) c’est un gros travail pour ramasser ces graines, c’est le travail des femmes. Ces graines sont collectées dans un Coolamon. C’est l’un des deux attributs essentiels des femmes, l’autre est le bâton à fouir (wana) elles s’en servent gratter le sol et régler leurs comptes.


Ce qu’on peut trouver à manger dans le bush, Bush Tucker (nourriture provenant de la nature)
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Ce qu’on peut trouver à manger dans le bush :
– Des raisins secs
– Des bananes du bush.
– Des prunes du bush.
– Des bush coconuts. C’est une petite guêpe qui fait sa larve au centre et pour la protéger, sécrète une matière blanche qui devient noir, mais tout ce qui est blanc est tout à fait comestible.
– Les witchetty grubs sont des larves d’un papillon de nuit qui fait environ 20 cm d’envergure. Ces vers sont dans les racines d’un arbre particulier. On peut les manger cru, ils ressemble à un œuf gobé, ou cuit c’est un goût d’œuf cuit et de noisette. C’est l’équivalent d’un steak en protéine.


Witchetty grubs (larves de sorcière)
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Les fourmis à miel. sont celles qui alimentent les couvains au fond de la fourmilière. Elles représentent un mets de choix pour les aborigènes car le sucre est une denrée rare dans la nature. Après quelques heures d’effort à creuser le sable rouge, on peut atteindre les galeries les plus profondes, attraper une fourmi par le thorax, légèrement inciser son abdomen remplis de miel et aspirer le délicieux liquide. On peut ensuite relâcher la fourmi qui ira poursuivre son travail car on ne prélève sur l’environnement que ce dont on a besoin pour ne pas rompre cet
équilibre parfait.


Fourmis à miel
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

C’est un mets très apprécié des aborigènes car il y a peu de sucre dans le bush. Un jour un aborigène que j’ai rencontré, qui avait eu son premier contact avec les blancs dans les années 70, m’avait dit que le premier jour, on lui avait donné un pot de confiture qu’il avait mangé immédiatement. Aujourd’hui il y a de gros problèmes de diabète chez les Aborigènes, qui ont tendance à consommer trop de sucre.
Voir bush truckers.

Les femmes sont en charge de la cueillette et de la chasse au petit gibier comme les Sand goannas ou les perenties comme illustré ci-dessous


Capture d’un grand perenties
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Avec cette dame on en avait attrapé un très grand perentie. Il peut être dangereux si on l’attaque C’est le deuxième plus grand lézard après le dragon de Komodo. Sa morsure est redoutable et attaque le système lymphatique et on peut en mourir rapidement.


Lézard « Thorny devil » (Diable épineux)
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Un petit lézard un peu effrayant qui a la particularité de ne jamais boire. Ses piquants servent à collecter la rosée et à l’orienter vers sa bouche. Il mange à peu près 2 à 3 000 fourmis par jour.
En savoir plus sur le Thorny devil

Ils mangent également des animaux plus gros.


Symboles de l’Australie
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Le kangourou et l’émeu sont les symboles de l’Australie qu’on retrouve sur les passeports. Ce sont les deux principales sources de nourriture des Aborigènes. Ces animaux n’ont pas de prédateurs. Les émeus ressemblent à des autruches, un peu plus petits, et ils courent très vite.


Un chasseur aborigène
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Voici un chasseur avec ses attributs, sa lance et son propulseur. Le propulseur double la longueur du bras et triple la distance de tir.
On trouve également des boomerangs (qui reviennent ou non). Ce n’est pas un outil spécifiquement australien car on en a retrouvé en Afrique, en particulier dans la tombe de Toutankhamon.


Un chasseur aborigène
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Voici un chasseur avec son bouclier, qui permettait d’éviter d’éventuelles lances adverses.

Beaucoup de kangourous sont écrasés sur les routes en Australie car ils viennent en bas des talus, qui sont les parties les plus humides et dans lesquelles il y a le plus de végétation. Leurs bébés sont parfois récupérés et vont dans des centres pour kangourous où ils sont élevés.

Ce peuple était tout d’abord nomade, chasseur cueilleur, ils restaient dans leurs zones, qui délimitaient leur langue, dans lesquelles ils se déplaçaient constamment en fonction des ressources de leur nourriture, en vivant en symbiose avec la nature. Ils vivaient par petits groupes de 10 a 20 personnes au plus mais ils pouvaient se retrouver quelques centaines pour les cérémonies ouvertes a tous.

Les cérémonies rythment la vie.

Les femmes en cérémonie. Remarquez les peintures corporelles.


Cérémonie d’hommes
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Voilà une cérémonie d’hommes. Il existe plusieurs types de cérémonies

Le Corroboree, c’est une cérémonie ouverte à tous femmes et enfants.
Pour des cérémonies plus spirituelles les hommes et les femmes sont séparés et n’ont pas le droit de voir ce qui se passe chez les autres. C’est un gros tabou.
Voir la découverte de la culture aborigène au cœur du désert australien

Ils ont réalisé que la consanguinité leur posait des problèmes. Pour résoudre ce problème, ils ont fait une séparation des groupes nord-sud et est-ouest. Les gens du Nord-ouest se marient avec ceux du sud-est et vice-versa. Au centre, ils ont rajouté un groupe si bien que l’on a 8 groupes d’hommes et 8 groupes de femmes. Avec les noms, on dispose de nombreuses indications : on connaît le nom de son père, on connaît le nom de sa mère, on connaît le nom de ses enfants, de son beau-frère, et cela donne une position.


Règles de mariage
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

J’ai été adopté par une famille aborigène. On m’a donné un nom Tjangala (lorsque le nom commence par T c’est un garçon lorsqu’il commence par N c’est une fille). Je sais que je vais me marier avec Nungarrayi et que mes enfants vont s’appeler (N) ou (T) Jampinjimpa »


Les aborigènes d’Australie et la Mort | Rites funéraires