La colonisation et son impact
On estimait la population aborigène à 500 000 individus avant la colonisation. Au début du 20e siècle, ce sont les missionnaires qui ont alerté le gouvernement australien estimant qu’il ne restait environ plus que 30 000 aborigènes. Beaucoup étaient morts de maladies contre lesquelles ils n’étaient pas immunisés.
Les hommes se faisaient emprisonner car ils chassaient le bétail (moutons et les vaches) que les colons blancs avaient importés. Beaucoup mouraient en général en prison.
À partir des années 20 le gouvernement a décidé de retirer les jeunes enfants métis de leur famille aborigène, et de les placer dans des institutions gérées par des missionnaires (Stolen generation). Lorsqu’ils sortaient c’était terrible parce qu’ils étaient rejetés par les deux communautés. Ceci a duré jusqu’en 1969.
En 1975 le Premier ministre de l’époque Gough Whitlam verse de la terre rouge dans la main de Vincent Lingiari, (qui était le leader d’une grève dans une ferme au nord de l’Australie) en lui promettant de rendre la terre aux Aborigènes.
Depuis, on a effectivement rendu aux Aborigènes certaines terres, qui étaient les plus désertiques et les plus reculées.
La spiritualité des Aborigènes
C’est un point très important qui est dans chacune des peintures aborigènes. C’est ce qu’on appelle le Dream time (le temps du rêve). C’est un nom qui était donné par le premier anthropologue australien à la fin du 19e siècle Walter Baldwin Spencer.
Les Aborigènes appellent cela Tjukurrpa. C’est une notion assez complexe qui englobe un certain nombre de choses.
Voici ce qu’en dit Françoise Dussart, une ethnologue franco-canadienne.
« Période ancestrale et immuable durant laquelle des êtres mythiques sortis de la terre, alors sans relief, voyagèrent et laissèrent sur le sol des empreintes matérielles de leurs actions extraordinaires. Ainsi ils sculptèrent le paysage et le ciel, ils apparaissent ensuite en rêve aux premiers êtres humains pour leur raconter le détail de leurs itinéraires, de leurs actions ainsi que de l’organisation socio-religieuse que les humains devaient adopter. Lorsque l’Univers a pris forme, il fut peuplé de toutes les espèces et, lorsque les multiples transformations furent accomplies, les ancêtres lassés se retirèrent dans la terre d’où ils étaient sortis, mais leur esprit reste une force qui dort dans tout ce qu’ils ont créé. »
La religion des Aborigènes
Voici un exemple :
C’est un concept complexe, qui aborde tout d’abord la Genèse. Pour les Aborigènes, au commencement, la terre était plate, sans couleur et sans vie, puis sortirent de terre ou des océans les ancêtres créateurs comme le serpent arc-en-ciel. Il sort de terre, il s’arque boute pour crever les nuages et il donne l’eau, élément essentiel de la vie. En s’arque boutant il va toucher à terre, un autre point qui va devenir un point d’eau permanent. Il forme ensuite des collines en se lovant pour dormir. Les montagnes laissent les traces de son passage. Il interagit également avec d’autres ancêtres. L’Australie est une grande carte de pistes de ces itinéraires d’ancêtres créateurs.
Certaines pistes font quelques centaines de kilomètres, ou plus comme par exemple le mythe des sept sœurs qui parcoure plusieurs milliers de kilomètres a travers divers groupes de langage. Ces pistes sont des pistes chantées car à chaque lieu particulier correspondent des chants.
Ce dreamtime se poursuit, le serpent arc-en-ciel fait son itinéraire et à la fin il retourne sous terre. L’endroit où il est sorti et celui d’où il est rentré sont des lieux sacrés de grande importance.
Tout cela est cartographié par les aborigènes et c’est ce que l’on retrouve dans les peintures.
Le dreamtime n’est pas seulement le passé, il est aussi le présent et le futur. On s’inscrit en fait dans un continuum de temps et d’espace. On retrouve d’ailleurs des cercles concentriques dans la plupart des peintures.
Peinture aborigène Mick Namararri Tjapaltjarri Flying Dingoes, 1974
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Voir un commentaire (Musée national d’Australie).
Avec le nom dont on a hérité viennent des droits et des devoirs ainsi que des totems, Dans certains groupes, on a pas le droit de manger ses totems. Par contre, on ne peut peindre que ses propres totems. La loi aborigène détermine la relation entre les êtres et surtout la relation à la terre tout en étant aussi connecté aux plantes et aux animaux.
Le serpent arc-en-ciel, est également un totem important, c’est lui qui amène l’eau. Il existe une grande cérémonie à la fin de la saison sèche pour faire venir l’eau. Les Rainmakers sont des faiseurs de pluie.
Au centre du pays, Uluru est un rocher sacré, pour les tribus Pitjantjatjara et Yankunytjatjara, car il s’agit d’une piste de Rêve. Six groupes de langage en ont un accès libre. Il attire des centaines de milliers de visiteurs chaque année. Personne n’a le droit d’y habiter on vient uniquement pour y faire des cérémonies, et pour l’éducation des jeunes enfants.
La peinture aborigène
Quels en sont les supports ? Au départ le sable, on dessine des cercles concentriques pour indiquer un lieu.
Une peinture se réfère toujours à un endroit particulier. Le U représente une personne assise vue de dessus c’est l’empreinte qu’elle laisse sur le sol. Pour savoir si c’est un homme ou une femme il faut regarder les attributs qui sont sur le côté.
Pour les cérémonies, il y a de grandes peintures de sable qui sont extraordinaires. Elles correspondent à des semaines de préparation. Lors de la cérémonie on danse dessus et tout doit disparaître parce que personne n’a le droit de les voir. Seuls deux groupes parmi les 8 sont autorisés à assister à cette cérémonie. C’est une cérémonie d’hommes où les femmes ne sont pas conviées. Remarquez que tout est circulaire. C’est un peu ce que l’on trouve dans les peintures.
J’ai eu l’occasion de n’en voir qu’une grande, comme celle-ci.
Le sol est constitué par une herbe un peu cotonneuse qui peut se peindre avec des ocres.
Le troisième support se sont les parois des grottes. Suivant les lieux, les représentations diffèrent, au centre rien de figuratif par contre au nord ils peignaient des animaux, et ils passaient du figuratif au symbolique.
On trouve également des peintures sur écorce.
Stéphane Jacob/ Galuma Maymuru, Spear Making at Djarrakpi, Pigments naturels sur écorce, 1999
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Dans les années 60, Karel Kupka ethnologue d’origine tchèque, a fait plusieurs voyages en Australie d’où il a ramené une magnifique collection de peintures sur écorce qui est actuellement au Musée du quai Branly.
En 1971 Geoff BARDON, jeune professeur d’art, arrive dans une communauté retirée dans le bush australien nommé Papunya au nord-ouest d’Alice Springs.
Il encourage ses élèves à dessiner leur propre culture plutôt que de tenter de reproduire des éléments de la culture blanche. Mais les enfants ne connaissent que très peu les coutumes des adultes qu’ils ne découvriront qu’à l’adolescence lorsqu’ils seront initiés.
Deux hommes qui s’occupaient de l’entretien de l’école voyant ce jeune blanc qui s’intéresse à la culture indigène, contactent les anciens. Old Tom Onion Tjapangati, propriétaire du rêve de la Fourmi à miel autorisa d’autres anciens (Billy Stockman Tjapaljarri, Long Jack Phillipus Tjakamarra, Kaapa Tjampitinpa) à peindre le mur de l’école.
Le Rêve de la Fourmi à Miel en 1971 sur le mur de l’école de Papunya
(cliquer sur l’image pour l’agrandir)
C’était une révolution pour les Aborigènes car ils exposaient, pour la première fois, aux femmes et aux enfants des symboles auxquels ils n’avaient pas accès. Ces peintres du désert vont alors changer la donne en troquant les supports naturels (sable, écorce, roche, peau…) pour des panneaux d’aggloméré, des toiles ou des cartons, et en utilisant de la peinture acrylique à la place des pigments naturels. Ils créent ainsi la coopérative de Papunya Tula en septembre 1971.
À partir de cette époque les hommes ont été pris d’une frénésie de peinture.
Ces toiles sont peintes à l’acrylique, auparavant ils utilisaient des pigments naturels mais ceux-ci sont très fragiles (ils résistent mal à la lumière en particulier), dans le Nord ils ont trouvé une méthode pour fixer les pigments à l’aide du blanc d’œuf de tortue.
La peinture aborigène représente soit les mythes du Temps du Rêve avec une cartographie de leur pays vu du ciel. Certaines sources de nourriture peuvent aussi y figurer
La signification de l’œuvre dépend du peintre, de la tribu ou encore de l’histoire racontée. De nombreux signes ne sont lisibles que pour les initiés et les peintures recèlent de secrets.
Voir les peintures aborigènes de Papunya.
Ningura Napurrula, peintre aborigene de Papunya
Voir d’autres peintures.