Voyage à Bruxelles et Anvers

Dans un style très différent, le musée possède aussi cette œuvre célèbre et étonnante de Bruegel l’Ancien, la chute d’Icare, une peinture à l’huile sur toile (le reste de son œuvre est sur bois).


Bruegel l’ancien la chute d’Icare non datée huile sur toile 73,5 × 112 cm Bruxelles – Musées royaux des Beaux-Arts
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La fin tragique d’Icare, dont on ne voit que les jambes en bas à droite, n’interrompt nullement le laboureur, le berger, le pêcheur, chacun restant concentré sur sa tâche quotidienne. Les gens ordinaires n’ont que faire d’un rêveur. Un proverbe flamand dit : “Aucun laboureur ne s’arrête pour la vie d’un homme !” Voir un commentaire.

Du 16e siècle, le musée possède aussi cette œuvre de Pieter Aertsen Jésus chez Marthe et Marie,


Pieter Aertsen Jésus chez Marthe et Marie 1607 huile sur toile 140 x 196,5 Bruxelles – Musées royaux des Beaux-Arts
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Selon le thème biblique, ici dans un décor Renaissance, les deux sœurs sont face à face, Marie à gauche, richement vêtue, écoute le Christ prêcher, un petit chien sur ses genoux. A droite, Marthe debout, vêtue sobrement tient un panier de victuailles auquel sont pendus deux lapins. Les deux sœurs incarnent deux alternatives pour les femmes : le monde profane ou la contemplation.

Et de la fin du 16e siècle, deux paysages anthropomorphes d’un artiste inconnu. Le phénomène de la double vision ne date donc pas de Salvador Dali.


Paysage anthropomorphe, seconde moitié du XVI° siècle Bruxelles – Musées royaux des Beaux-Arts
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Voir également : Paysage 2 suivant ce que l’on regarde, on peut voir soit un paysage soit un visage.


Rembrandt, portrait de Nicolaes van Bambeeck, 1641 huile sur toile 105,5 x 84 cm Bruxelles – Musées royaux des Beaux-Arts
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Un beau portrait d’homme de Rembrandt 1641

… et une salle entière consacrée aux esquisses préparatoires de Rubens, sur des sujets mythologiques, qui sont d’une grande modernité par rapport à ses grandes compositions abouties.
De Rubens aussi, 4 études de la tête d’un maure et portrait d’un africain au turban. Initialement le premier tableau portait le titre de : tête de nègre. Le choix contemporain le terme de maure s’explique parce qu’au temps de Rubens le terme désignait un homme noir.
Le musée distribue aux visiteurs un fascicule explicitant ses choix et expliquant que Rubens réalisait ses études de têtes pour insérer ces figures de noirs dans ses grandes œuvres religieuses comme l’Adoration des Mages, ou mythologiques.
Au 19e siècle Constantin Meunier a fait une copie des 4 études de Rubens qui a servi à orner le billet de 500 francs belges entre 1950 et 1960 avec Léopold II au dos pour célébrer le centenaire du règne de ce souverain attaché au colonialisme donc contesté aujourd’hui.

Le musée possède aussi le célèbre portrait de Marat assassiné, la mort de Marat par David qui avait été prêté lors de notre passage. Voir un commentaire.


Jacques Louis David l’assassinat de Marat 1793 huile sur toile 168 x 128 cm Bruxelles – Musées royaux des Beaux-Arts
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Dans la partie musée moderne, était présentée une exposition James Ensor 1860-1949, que nous connaissons surtout pour ses scènes de carnaval et ses masques. Nous avons vu une dimension plus complète de l’œuvre de ce peintre avec notamment ses paysages Marine grise et les toits d’Ostende, sensible aux effets lumineux (et influencé par Turner) et la grande toile qui l’a rendu célèbre en Belgique “mangeuse d’huîtres” 1882 qui pour nous peut invoquer un Manet.


James Ensor mangeuse d’huitres 1882 huile sur toile 207 x 150,5 cm Anvers – Musée royal des Beaux-Arts
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Il a eu ensuite une période flirtant avec l’abstraction dont le sujet paraît dilué dans le geste pour la chute des anges rebelles 1889


James Ensor la chute des anges rebelles 1889 huile sur toile 108 x 132 cm Anvers – Musée royal des Beaux-Arts
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Où dans :
Adam et Eve chassés du Paradis 1887 (ils s’enfuient en bas à droite).

C’est seulement après qu’interviennent les représentations des masques grotesques et des scènes de carnaval morbides.


James Ensor Nature morte dans l’atelier, 1889 huile sur toile 83 x 114 cm Neue Pinakothek, München
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Voir également :
L’étonnement du masque Wouse, 1889
Squelette se disputant un pendu, 1891
La mort et les masques, 1897
L’intrigue, 1890
Art Ensor/Hareng saur, 1891
Le peintre dans l’atelier,
En savoir plus sur James Ensor. Ensor est un peintre qui a beaucoup influencé les expressionnistes allemands au début.

Le musée Magritte est accolé au Musée royal des Beaux-Arts et les fenêtres de sa façade sont déjà surréalistes. En raison de travaux, les œuvres de la collection belge ont été regroupées dans quelques salles, sans l’accompagnement pédagogique habituel. Nous avons vu ses débuts dans la publicité pour une maison de couture, pour la centrale des ouvriers textiles de Belgique en 1938, mais aussi des œuvres surréalistes connues comme la réponse imprévue de 1932,


René Magritte réponse imprévue 1933 huile sur toile 82 × 54,4 cm cm Musée Magritte Bruxelles
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Cette huile sur toile surréaliste représente une porte fermée dans laquelle une ouverture grossièrement semblable à la forme d’un corps a été pratiquée.


René Magritte Magie noire 1933 huile sur toile 79 x 59 cm Musée Magritte Bruxelles
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Magie noire 1933 1934. Voir un commentaire.


René Magritte l’Empire des lumières 1954 huile sur toile 82 × 54,4 cm cm Musée Magritte Bruxelles
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L’Empire des lumières 1954. Voir un commentaire.


René Magritte le retour 1940 huile sur toile 82 × 54,4 cm cm Musée Magritte Bruxelles
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Le retour 1940. Ce tableau 1940 est intitulé le retour et le retour dont il est question ici c’est celui de Magritte lui même qui va quitter Carcassonne où il est en exil, au moment où il reçoit une lettre de son épouse Georgette, qui lui explique qu’il peut revenir à Bruxelles qu’il ne sera pas menacé et qu’il va la retrouver.

Après une pause bienvenue pour souffler et se restaurer dans l’une de ces belles architectures du quartier. Nous avons visité l’après-midi le MIM Musée des instruments de musique, situé dans un très beau bâtiment Art Nouveau construit pour Old England.


Musée des instruments de musique Bruxelles
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Sur quatre étages sont rassemblés 7 000 instruments de toutes les régions du monde et de toutes les époques, que l’on peut écouter grâce à un casque. C’est un parcours exceptionnel, avec une présentation remarquablement mise en scène et très documentée.


Musée des instruments de musique Bruxelles Clavecin français
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Voir également des instruments jouant de manière autonome.

Le soir épuisés nous avons pu constater que les galeries du roi et de la reine étaient éclairées de leds aux couleurs changeantes.


Galeries du roi et de la reine Bruxelles
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Jour 3

Nous avions rendez-vous au musée Victor Horta situé dans le haut-Bruxelles à Saint-Gilles, un quartier résidentiel. Le musée est installé dans 2 étroites maisons (qui étaient son habitation et son atelier), que l’architecte Victor Horta avait fait construire entre 1898 et 1901. C’est un ensemble Art nouveau dans lequel la courbe est reine, ainsi que le verre et le fer.


Musée Horta Bruxelles
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L’architecte prenait en charge l’ensemble des volumes, les matériaux, les objets, les meubles et jusqu’aux luminaires et aux poignées de porte. Malheureusement là, il était interdit de prendre des photos. D’autres réalisations art nouveau sont visibles dans ce quartier.

L’après-midi nous sommes allés dans le quartier de Sainte-Catherine, avec une ambiance populaire conviviale et là, nous avons visité la centrale d’art contemporain qui présente des artistes contemporains européens dans deux espaces différents.

Dans l’un, il s’agissait de Yannick Ganseman, un artiste belge né en 1984 dont le travail oscille entre peinture et sculpture, avec du bois, du plâtre, de la mousse polyuréthane et du polyéthylène il réalise des bas reliefs et hauts reliefs.


La Centrale d’Art Contemporain, Yannick Ganseman Bruxelles
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J’ai lu par la suite, que pour cette exposition, il a fait le pari de réaliser sur place des œuvres représentant la place Sainte-Catherine, sa circulation, ses travaux, son quotidien pendant toute la durée de l’exposition.


La Centrale d’Art Contemporain, Yannick Ganseman Bruxelles
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Dans un autre espace plus vaste, Mehdi Georges Lahlou, né en 1983 au Sables-d’Olonne, d’origine marocaine (vit et travaille à Bruxelles et à Paris) son travail puise dans ses propres expériences, mais aussi dans l’histoire et dans des archives de guerre. Dans une première salle, une suite d’écrans vidéo présente avec le même cadrage, l’artiste torse nu en train de respirer, dans un dégradé de couleur du jaune au vert orange.


La Centrale d’Art Contemporain, Mehdi Georges Lahlou 2015 Bruxelles
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C’est une œuvre de 2015, créée pour une exposition consacrée à la Première Guerre mondiale. L’air environnant l’artiste est saturé de particules d’épices pour évoquer l’utilisation du gaz moutarde.


La Centrale d’Art Contemporain, Mehdi Georges Lahlou 2015 Bruxelles
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En face, sur un grand mur, un palimpseste d’injures et de propos racistes contemporains collectés en ligne.

Dans une autre salle, une série de tableaux noirs dans lesquels, en s’approchant, on finit par percevoir des formes couchées au sol. Le cartel dit : “Impression digitale et charbon de bois”. L’utilisation des gaz létaux a été l’occasion d’expériences scientifiques pour les Allemands, avec à la clé des centaines de photos de morts. Les soldats gazés étaient bretons, normands, et d’autres venus des colonies. L’artiste a trouvé 9 photos de nord-africains dans les archives d’Ypres. Il les a agrandies et recouvertes d’un nuage velouté de charbon de bois, révélant à la lumière des nuances de noir, une réalité effacée des mémoires collectives.

En contrastant avec ces images noires, une sculpture blanche intitulée le grenadier. Un autoportrait de l’artiste couvert de grenades éclatées, et des colonnes sans fin composées d’un empilement de têtes intitulé “oiseau de paradis”.


Mehdi Georges Lahlou le grenadier 2015 Bruxelles La Centrale d’Art Contemporain,
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Mehdi-Georges Lahlou & guest Candice Breitz

Sollicité pour inviter l’artiste de son choix, Mehdi Georges Lahlou a invité Candice Breitz (née en 1972 en Afrique du Sud elle vit et travaille à Berlin), qui elle aussi développe un propos politique et se met en scène elle-même. En particulier dans une vidéo intitulée white face 1922-2022 elle interprète une multitude de déclarations de personnalités blanches qui s’expriment dans les médias sud-africains sur la question du racisme, en soulignant de façon imparable les manifestations de la suprématie blanche. En face des écrans montrant l’artiste grimée, un petit écran montre le discours source puisé à la télévision avec les mêmes propos et les mêmes mimiques.

Enfin dans une autre salle, un salon avec une banquette, une télévision, et plantes vertes. Le titre était “extra”. A l’écran, on voyait une télénovela sud-africaine qui retraçait en langue bantoue, l’histoire de la classe moyenne noire émergente du pays après l’apartheid.


La Centrale d’Art Contemporain, Candice Breitz Bruxelles
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L’artiste s’est incrustée dans la série pendant un épisode tourné en 2011. Incongrue, elle s’agrippe parfois aux personnages, mimant ainsi la minorité blanche accrochée à ses privilèges.

En fin d’après-midi nous avons visité le Centre Belge de la Bande Dessinée, installé dans un bâtiment Art Nouveau dessiné par Victor Horta en 1903 pour les magasins Waucquez (textiles en gros).


Centre Belge de la Bande Dessinée Bruxelles
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7 000 planches originales des dessinateurs de BD pour bédéphiles passionnés.

Jour 4

Nous prenons le train pour Anvers, à environ 45 minutes de trajet. La gare d’Anvers est incroyable, mêlant les nécessités de l’important réseau ferroviaire contemporain et le faste d’une architecture baroque assez éblouissante. Ici le flamand est roi alors qu’à Bruxelles on parle les deux langues. La gare, Central Station a été construite entre 1898 et 1905, et depuis 2 000 un chantier titanesque a été creusé pour accueillir les Thalys sur les quais souterrains ultra modernes.


Hall de la gare d’Anvers
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Nous nous dirigeons vers notre hôtel en empruntant le Meir, la grande rue commerçante de la ville. Là, les enseignes internationales (McDo, Zara, Lacoste, …) sont installées sur des façades baroques ornées de pilastres, de niches et de sculptures.


Anvers Shopping Stadsfeestzaal
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Nous découvrirons deux jours après, qu’un grand magasin s’est installé dans une ancienne salle de bal !

Une fois réglé les questions pratiques, notre première visite est pour le cœur du vieux centre, des rues étroites débouchant sur de vastes places pavées.


Anvers Handschoenmarkt
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Sur l’une d’elles, la Handschoenmarkt, (autrefois place du Marché aux gants) les pavés se soulèvent pour border comme une couverture la statue d’un garçon et de son chien endormis. C’est signé Batist Vermeulen c’est un clin d’œil au roman a dog of Flanders 1872 qui se passe à Anvers.

A côté, la Grote Markt, (Grand-Place) est entourée de beaux édifices le Stadhuis, hôtel de ville dont la façade date du 16e siècle, les maisons des corporations 16e 17e siècle comme à Bruxelles, et au centre la Brabo fontaine (fontaine de Brabo),


Anvers Brabo fontaine
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Elle est dominée par le geste légendaire de Silvius Brabo brandissant la main du géant Druon qu’il a tué. Selon une légende, la ville d’Anvers serait née de l’exploit du guerrier romain Silvius Brabo qui aurait provoqué le géant Druon Antigon, pilleur des bateaux transitant sur l’Escaut, lui aurait coupé la main et l’aurait jetée dans le fleuve. Hand werpen (jeter la main). Il est vrai que la première occupation du site date du 3e siècle, mais le nom d’Antwerpen semble dérivé de Antwerpen qui signifie alluvions.

La cathédrale est le bâtiment dominant de ce vieux centre. C’est aussi le plus grand monument de Belgique, avec une tour qui s’élève à 123 mètres de hauteur.


Anvers Cathédrale
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Elle a été construite entre 1352 et 1521. Au pied de cette tour, 4 personnages semblent travailler sur ce chantier, c’est l’œuvre de Jef Lambeaux en 1914. Ce monument rend hommage à l’un des architectes de la cathédrale d’Anvers, Pieter Appelmans.

L’intérieur est immense: 7 vaisseaux, 125 piliers sur 117 m de longueur. Une sculpture de Jan Fabre, l’homme qui porte la Croix en bronze doré, date de 2015.
Nous nous sommes précipités vers les deux grands triptyques de Rubens. Dans le bras gauche du transept, l’érection de la Croix 1610.


Pierre-Paul Rubens l’érection de la Croix 1610 triptyque huile sur bois 460 × 640 et 430 cm Anvers Cathédrale
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Composition en diagonale, avec des jeux de courbes et de contre courbes de part et d’autre du corps du Christ. C’est une œuvre de jeunesse de Rubens, qui, revenant d’un voyage en Italie, avait été séduit par Michel-Ange et par les jeux de contraste du Caravage, d’où l’exaltation des corps musclés et des contrastes. Voir un commentaire.

Dans le transept droit, la descente de croix


Pierre-Paul Rubens la descente de Croix 1612 triptyque huile sur toile 420,5 × 320 cm Anvers Cathédrale
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Le corps du Christ exsangue et son linceul forment une diagonale qui contraste avec le rouge du vêtement de Saint-Jean et la blancheur de Marie-Madeleine, vêtue de vert. Voir un commentaire.

Au-dessus du maître autel, une assomption de 1626 montre comment Rubens a évolué ensuite vers un style moins dessiné, moins italianisant.


Pierre-Paul Rubens assomption 1626 huile sur toile 490 × 325 cm Anvers Cathédrale
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La cathédrale abrite de nombreuses autres œuvres, nous avons aimé la déploration du Christ de Quentin Metsys et sourit devant le jugement dernier avec la famille Plantin de Jacob de Backer


Jacob De Backer, Jugement dernier avec la famille Plantin 1580 huile sur bois 140 × 105 cm Anvers Cathédrale
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