Cours du 13 avril 2015

Simon Hantaï – Le groupe support surface

Sommaire : Simon Hantaï – Le groupe support surface : Daniel Dezeuze, Claude Viallat, Patrick Saytour, Vincent Boulès, Noël Dolla, Toni Grand, Bernard Pagès

Simon Hantaï (1922 – 2008).
Né en Hongrie, destiné à des études d’ingénieur, Hantaï s’inscrit contre toute attente à l’École des Beaux-Arts de Budapest. Durant la guerre, il s’engage avec les communistes contre l’Allemagne et le gouvernement hongrois qui collabore avec l’occupant.
En 1948, avec son épouse Zsuzsa Biro, jeune peintre rencontrée aux Beaux-Arts de Budapest, il projette de séjourner à Paris, grâce à une bourse promise dans leur pays. Dans l’attente d’un visa français qui tarde à leur parvenir, le couple décide de partir pour Rome et parcourt l’Italie, où Hantaï découvre, les mosaïques de Ravenne « Piero della Francesca, Masaccio, la Madonna bleu-noir de Giotto aux Offices. Ils rejoignent Paris à l’automne, où ils apprennent que leur bourse leur est finalement refusée et qu’ils doivent rentrer en Hongrie. Les communistes prennent le pouvoir à Budapest, c’est alors qu’ils prennent la décision de rester en France.

En 1949 il fréquente les musées, les galeries, l’art américain.


Simon Hantaï – Les baigneuses (1949) 110 x 167 cm
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Traduit l’influence des primitivistes hongrois … et italiens.

En 1952, il découvre le surréalisme, le jour de ses trente ans, le 7 décembre 1952, Hantaï dépose un petit tableau-objet non signé devant la porte d’André Breton, rue Fontaine… qui l’installe aussitôt dans la vitrine d’une galerie. Celui-ci lui propose sa première exposition personnelle, qui aura lieu en janvier-février 1953

Durant sa période surréaliste, Hantaï utilise des ossements d’animaux, crânes de volailles, arêtes de poissons.


Simon Hantaï – Famille miroir (1953) 142,5 x 173,7 x 22,5 cm
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Famille miroir (1953) 142,5 x 173,7 x 22,5 cm

Le personnage central (la femelle) tourne le dos au miroir. « Grande femelle neuve indécente, petit miroir très vieux, très abîmé. Elle s’interpose entre le miroir et nous. Le crâne d’animal (de lapin) qui lui tient lieu de tête la rend curieusement humaine« .


Simon Hantaï – Narcisse collectif (1953) 87,5 x 59 x 16 cm
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Narcisse collectif (1953) 87,5 x 59 x 16 cm. Voir un détail.

En 1955 Hantaï adresse une lettre à André Breton annonçant sa rupture avec le groupe surréaliste.
Il a découvert entre temps, Jackson Pollock et Georges Matthieu.


Simon Hantaï – Sexe, prisme, hommage à J. Pierre Brisset (1955) 240 x 530 cm
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Sexe, prisme, hommage à J. Pierre Brisset (1955) 240 x 530 cm

Écrivain français du XIXéme siècle, cette œuvre a été exécutée dans un état de furie créatrice (dans un climat magico-érotique). Les formes organiques ont été grattées dans la peinture fraiche à l’aide d’un cercle de métal provenant d’un vieux réveil.


Simon Hantaï – Peinture (1958-59) 148 x 105 cm
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Peinture (1958-59) 148 x 105 cm

Il expérimente de nouvelles voies, en juxtaposant des touches régulières qu’il racle en faisant apparaître les couleurs du dessous, renvoyant à la périphérie de la toile le jus noir qui recouvrait tout au départ.

Parallèlement dans les années 58-59, il s’attaque à deux grands formats (326 x 400 cm chacun) qui vont l’occuper durant toute l’année 1959.
Le 30 novembre 1958, premier dimanche de l’Avent, le peintre entame, dans la solitude, une aventure inspirée des exercices spirituels d’Ignace de Loyola et qu’il gardera longtemps secrète : deux toiles monumentales, travaillées chaque jour au retour de la messe, l’une le matin, l’autre l’après-midi, une année durant.


Simon Hantaï : Peinture (Écriture rose) (1958… par centrepompidou
Simon Hantaï – Peinture (écriture rose) (1958-59) 329,5 x 424,5 cm

Tous les matins il travaille sur peinture (écriture rose) sur laquelle il transcrit graphiquement la liturgie entendue à la messe du jour. La peinture se couvre peu à peu de textes philosophiques, esthétiques ou poétiques. La superposition des encres (noir, rouge, verte, violette) donne à l’ensemble une tonalité rose.
« Des semaines et des semaines des pattes de mouche laissaient la toile totalement vide. Pour m’encourager et aussi pour donner visiblement des signes du sujet, j’ai collé quelques feuilles d’or … en me disant l’écriture devrait manger, surmonter tout ça. Plus tard, sur une tâche de feuille d’or, j’ai peint une croix grecque, sur une tâche d’argent, une étoile de David et plus tard une éclaboussure devenant le signe de Luther. »


Simon Hantaï – Galla Placidia (1958-59) 326 x 400 cm Paris, Musée d’art moderne de la Ville de Paris
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L’après midi, il travaille sur à Galla Placidia, deux morceaux de toile cousus, mis sur un châssis, encollés, couverts de deux couches de peinture blanche. Quelques zones colorées vaguement en rouge, puis toute la surface est recouverte d’une couche noire et immédiatement du haut vers le bas avec l’entour d’un réveil matin aplati en ellipse, raclé horizontalement.
Ensuite longuement pendant de longs mois, j’ai prélevé de très légères quantités de couleurs, étalées sur une plaque de verre et je ai déposées sur toute l’étendue
. (note accompagnant la donation au MAM en 1998).
« C’est ma peinture, je l’ai beaucoup regardée. Elle m’échappe et m’impressionne. C’est ainsi que je vous l’offre. »

Série des Mariales


Simon Hantaï – Série des Mariales (1960 – 62)
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En 1960, Simon Hantaï fait une découverte majeure qui bouleversera toute son œuvre : la technique du pliage. Il y restera fidèle toute sa vie. Elle sera sa signature pour le monde entier. Elle consiste à plier la toile avant de la peindre, puis de la redéployer ultérieurement, afin de découvrir l’œuvre finale.
En 1960 – 62, il travaille à la série des Mariales, en utilisant le pliage. La toile est froissée de bord en bord et les parties restées accessibles sont peintes. Elle est ensuite dépliée, et les parties en réserve (l’intérieur des plis) sont peintes à leur tour, créant un all over complexe. Les Mariales des groupes m.a et m.b. Ne sont que partiellement défroissées, créant une géographie de creux et de reliefs proche de l’aspect d’un mur. En somme écrit Dominique Fourcade, les mariales sont de l’art pariétal, elles épousent les contours d’un mur qui n’existait pas avant elles.

Mais ce n’est pas à L’art pariétal que songe Hantaï, c’est au manteau de la Vierge de Pietro de la Francesca à Borgo Sansepolecro (d’où le titre de Mariales) et au déploiement théâtral de ces couches de couleurs.
Désormais son travail comportera une part de surprise.

Voir les pliages de Simon Hantaï

Ici on obtient un effet de vitrail.

Mariales m.a.1 (bleu)
Mariale m.a.2 (1960) 278 x 214 cm

Il en a peint 27, variant à chaque fois légèrement le protocole.

Il réalise 9 toiles dont le fond a été éclaboussé de peinture et de brou de noix avant le pliage. La surface de la peinture apparaît comme déchiquetée.

Mariale m.d.4 (1962) orange brun

Voir d’autres oeuvres.

Série des « Catamurons » (1963-1964) (du nom d’une maison de vacances qu’il loue à Varengeville au bord de la mer chaque été), et c’est l’image d’une serviette bleue sur une porte en bois se détachant sur un mur blanc qui l’a inspiré.
La toile froissée est peinte, puis recouverte d’une couche de peinture blanche. Ensuite ses bords sont repliés et le carré restant est de nouveau froissé et peint plusieurs fois.


Simon Hantaï – Catamuron (1964) MM2 Musée de Grenoble
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Catamuron (1964) 240 x 198 cm.


Simon Hantaï – Série des Catamuron (1964)
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Catamuron (1963)

Voir d’autres oeuvres de Simon Hantaï.

Série des panses
La suite commencée en 1964, intitulée Maman ! Maman !, dits : La Saucisse évoque l’embryonnaire, le cellulaire, en référence à une citation d’Henri Michaux. « Tout, véritablement tout, est à recommencer par la base : par les cellules, de plantes, de moines, de proto-animaux : l’alphabet de la vie. (…) La cellule peut encore sauver le monde, elle seule, saucisse cosmique sans laquelle on ne pourra plus se défendre. » (Henri Michaux, Vents et poussières, Paris, Karl Flinker, 1962).
La toile est nouée aux quatre angles en un sac informe avant d’être peinte, dépliée éventuellement peinte et dépliée plusieurs fois … puis tendue. Les formes ainsi obtenues flottent dans un espace non peint.


Simon Hantaï – Série des panses (1964) MM2 Musée de Grenoble
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Simon Hantaï – Série des panses (1964)
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Etant donné la caractère embryonnaire, cellulaire, … il n’est pas indifférent peut être de savoir que juste avant, la fin 1963, sa mère est venue le voir à Paris pour la dernière fois. On n’est plus dans l’expansion, l’ouverture, mais dans le cocon.

Série des Meuns

1967 – Les Meuns (nom du village près de Fontainebleau, où il s’est installé en 1966).
C’est comme une panse qui se desserre progressivement et c’est le début d’une peinture avec de plus en plus grandes masses de couleurs, avec des parties plus diluées.


Simon Hantaï : Meun, (1967) Nîmes, Carré d’art-Musée d’art contemporain
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