L’art contemporain africain

Chéri Samba né en 1956 au Congo dans un village où son père était forgeron. En 1972, à 17 ans il part pour Kinshasa travailler comme peintre d’enseignes et de publicités. Il est autodidacte, créateur populaire mais pas naïf, il met en scène le colonialisme, le racisme, les inégalités, les maladies, la corruption. “Ma peinture intervient sur la vie des gens je ne m’intéresse pas aux mythes ni aux croyances, j’interpelle les consciences. Les artistes doivent faire réfléchir.”
Il peint à l’acrylique, et son personnage est présent presque partout sur ses peintures, accompagnées de textes.


Chéri Samba Assedic ANPE (1992) Musée national de l’histoire de l’immigration Paris
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Voir également :
Les virus jumeaux sida et Ébola (1993)
Marche de soutien à la campagne contre le sida (1993) Huile et paillettes sur toile préparée 134,5 x 200 cm Centre Pompidou Paris.
Pourquoi les Africains ne progressent ils pas ? (1994) Acrylique sur toile 131 x 200 cm.
Les chefs de cuisine zaïroise 1993
Les fonctionnaires en Afrique noire 1994 Acrylique sur toile 128 x 199 cm.
Puis en 1999, lorsqu’il apprend au cours de sa visite des réserves africaines de l’Université de Zurich, que le collectionneur n’a jamais fait le voyage en Afrique, il peint hommage aux anciens créateurs (Il se met en scène, c’est son autoportrait).
Sa question devient ensuite, quel avenir pour notre art ?


Chéri Samba Quel avenir pour notre art (1997) acrylique sur toile 132 x 203 cm
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Dans un monde où les artistes vivants sont pour la plupart opprimés, une seule solution : être accepté en France. C’est Picasso, puis le Centre Pompidou qui incarnent cette modernité occidentale inaccessible. Voir l’autre partie du triptyque : Le musée d’art moderne n’est-il pas raciste ? et le troisième.
Viennent ensuite après le 11 septembre 2002 :


Chéri Samba après le 11 septembre (2002) acrylique sur toile 200 x 350 x 5 cm Collection d’Art Africain Contemporain – Collection Jean Pigozzi
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Voir également :
Le commun des politiciens (2003) acrylique et paillettes sur toile.
Les difficultés à trouver de l’eau problème d’eau où trouver l’eau.
Je suis les poumons et le cœur du monde, (2019) Acrylique et paillettes sur toile 135 x 200 cm. Il incarne l’Afrique.
Le monde vomissant (2004) Acrylique et paillettes sur toile 200 x 269 cm.
Dans la vraie carte du monde, il apparaît en sauveur au sein de nouveaux rapports de force au profit de l’Afrique, de l’Amérique-Latine, et de l’Asie du Sud.

Il a une volonté pédagogique affichée, avec des textes un peu moralisateurs. Chéri Samba produit des images chargées de sens et en même temps faciles à comprendre, Il ajoute souvent des paillettes à sa peinture (ironie sur le goût du clinquant en Afrique) il est parmi les artistes africains les plus demandés actuellement.

Voir d’autres oeuvres de Chéri Samba.


Exposition Africa Remix
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En 2005 le Centre Pompidou a présenté une grande exposition intitulée Africa Remix, exposition qui avait déjà été présentée à Londres et partira ensuite à Düsseldorf, puis à Tokyo. Le commissaire d’exposition Simon Njami est d’origine camerounaise, pour la première fois, 87 artistes africains ou d’origine africaine, présentent 200 œuvres. Pour Jean Hubert Martin, « Remix » signifie que les chances sont redistribuées. La plupart des artistes appartiennent à la génération qui a grandi avec Internet et a bénéficié en Afrique des nouvelles écoles des beaux-arts créées à partir des années 60.
Cette fois, les œuvres très diverses étaient réparties selon trois sections : identité et histoire, corps et esprit, ville et terre.

El Anatsui né au Ghana en 1944. Il a perdu sa mère et a été élevé par son oncle. Il étudie les beaux-arts à l’université des sciences et technologies Kwame Nkrumah à Kumasi, dont il est diplômé en 1969. Entre 1975 et 2000, il enseigne la sculpture à l’université de Nsukka au Nigeria.

En 1992, El Anatsui est invité en tant qu’artiste au sommet de Rio.

Il a obtenu Lion d’Or à la Biennale de Venise en 2015.


El Anatsui
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Ses grandes tentures emblématiques aux reflets mordorés sont réalisées à partir de capsules de bouteilles aplaties reliées par des fils de cuivre dans un assemblage complexe et minutieux mêlant tissu, peinture et sculpture.
Ses sculptures métalliques complexes et chatoyantes subliment des matériaux au rebut mais néanmoins empreints d’une charge métaphorique et dont l’usage atteste d’une préoccupation à la fois culturelle et environnementale.

Pour en savoir plus sur El Anatsui

Samuel Fosso né en 1962 au Cameroun a d’abord vécu au Nigeria avec ses parents. A 5 ans il perd sa mère, il est élevé par ses grands-parents. Son grand-père est guérisseur, ils sont de l’ethnie Ibo, au centre de la région du Biafra, dévastée par la guerre. Il est le seul enfant de son âge à avoir survécu, à 10 ans, à la mort de son grand père, il rejoint son frère en République centrafricaine, travaille chez un cordonnier puis apprenti chez un photographe. Il ouvre ensuite son premier studio. En 2014, il fuit la guerre civile, et se réfugie à Paris. Sa maison à Bangui a été pillée et toutes ses archives brûlées. Désormais, il vit au Nigeria avec sa femme et ses 4 enfants.


Samuel Fosso, Le chef (qui a vendu l’Afrique aux colons) (1997) Epreuve Cibachrome 101 x 101 cm Centre Pompidou
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Le Chef fait partie d’une série réalisée pour les boutiques de vêtements Tati à Paris, dans laquelle l’artiste adopte différentes identités. Il se met en scène lui-même. Fosso joue ici sur les représentations occidentales clichées des potentats africains tout en évoquant aussi le rôle de ces derniers dans la traite des esclaves. Coiffé de la coiffe royale affectée par le dictateur congolais Mobutu, Fosso transforme radicalement la fonction de l’autoportrait.


Samuel Fosso, La Femme américaine libérée des années 70 (1997) Epreuve chromogène 127 x 101 cm Centre Pompidou
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Samuel Fosso La femme libérée les années 70, série Tati 1994, c’est encore lui.
En 2003 le rêve de mon grand-père est un hommage à celui qui l’a élevé. En 2008 il a emprunté l’identité de célébrités africaines en noir et blanc. Autoportraits, Série « African Spirits », en 2008.
Il a été exposé aux rencontres photographiques d’Arles en 2021.
La série 666 resserrée sur son visage grave, une photographie a été prise chaque jour pendant 4 semaines au Polaroid.


Samuel Fosso, série 666 (2020)
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Il est exposé à la MEP Maison Européenne de la Photographie du 10 novembre au 13 mars 2022. L’artiste dit ceci : “666 c’est le chiffre du diable mais pour moi c’est aussi celui de la chance. J’ai survécu à la maladie, à la guerre, au deuil, à la destruction de toutes mes archives, c’est un bonheur d’avoir la MEP pour l’hiver.


Le maître de la performance et de l’autoportrait Samuel Fosso

Hassan Musa né en 1951 au Soudan. Après des études aux beaux-arts de Khartoum, il est devenu décorateur pour la télévision, puis a travaillé pour une maison d’édition. En 1978 il s’installe en France, il enseigne l’arabe, puis les arts plastiques, tout en réalisant des livres illustrés pour enfants. En 1989, il obtient un doctorat en histoire de l’art à l’Université de Montpellier. Il vit dans un village du Gard. Ses peintures et ses encres sur textile imprimés et assemblés se réapproprient l’iconographie de l’histoire de l’art occidental.


Hassan Musa, Great america nude (2002)
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Great american nude 2002 emprunte son titre aux œuvres du pop artiste Tom Wesselmann en même temps que la pose de la jeune fille allongée de Boucher au 18e siècle, dont le doux visage a été remplacé par celui de Ben Laden.


Hassan Musa, I love you with my iPhone
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De même dans I love you with my iPhone il reprend la mort de Marat peinte par David.

Che Guevara est peint sur un tissu imprimé de petites voitures avec le slogan « Révolter tue », les glaneuses de Millet sont armées, de même que la jeune fille de Gauguin, et la laitière en gilet jaune 2019.


Hassan Musa, Christophe de Lampedusa
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Christophe de Lampedusa avec le masque de Batman d’après le Saint Christophe de Jérôme Bosch.

Hassan Musa a pris la nationalité française, depuis 1990 il a épousé une enseignante française.

Marlène Dumas née en 1953 en Afrique du Sud au Cap, en pleine apartheid vit aux Pays-Bas depuis 1976 où elle a étudié l’art, puis la psychologie. Elle peint et dessine dans la tradition expressionniste, mais de façon distanciée, car elle travaille à partir de photos récupérées dans les magazines ou des cartes postales, plus rarement d’après des photos personnelles. Avec une grande économie de moyens, elle aborde les thèmes de la violence, de la sexualité la bulle de la mort, du racisme.


Marlène Dumas Naomi 1995 huile sur toile 130 × 100cm Musée Stedelijk d’Amsterdam
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Voir également :
Mamma Roma 2012 Huile sur toile 30 x 24 x 2,5 cm Tate modern Londres
Stern huile sur toile 110 × 130 cm Tate


Marlène Dumas L’image comme fardeau 1993 huile sur toile, 40 x 50 cm, collection particulière
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Inspiré du film « Camille » de Georges Cukor en 1936.
Pour aller plus loin sur Marlène Dumas.
Voir également :
The widow 2013 huile sur toile 60 × 80 cm Fondation Beyeler. C’est Pauline Lumumba après l’assassinat de son mari.

Voir d’autres oeuvres de Marlène Dumas.

Wangechi Mutu, est née en 1972 au Kenya, elle vit et travaille à New York. Elle a fait des études en beaux-arts et en anthropologie dans divers établissements jusqu’en 1996 ; elle obtient un diplôme en sculpture à l’université Yale en 2000.
Elle réalise des peintures, des collages, des sculptures et des installations, dans lesquels elle explore les thèmes du genre, de la race et de l’érotisation du corps féminin. Son sujet principal est le corps de la femme noire, objet de désir et de violence, et lieu de projection de fantasmes raciaux.


Wangechi Mutu Youyou mama 2003 Encre, paillettes de mica, acrylique, film sensible à la pression, papier imprimé coupé-collé et papier peint sur papier 150,2 x 215,9 cm MoMA New Yoyk
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Youyou mama 2003, c’est le portrait d’une femme politique pionnière du féminisme au Nigeria (Funnilayo Ranone-Kuli) brandissant un serpent sans tête au milieu d’une végétation surréaliste, avec à ses pieds la tête ensanglantée du serpent.

Family tree


Wangechi Mutu suspended play time 2008
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En 2008 suspended play time montre des dizaines de sacs à ordures ligotés en boules suspendus au plafond. Cette installation fait référence à l’usage commun des sacs-poubelle par les enfants africains pour improviser des ballons. Elle réalise aussi des sculptures mêlant la terre, le bois et le bronze, avec souvent l’idée de la femme empêchée de…
Voir d’autres oeuvres de Wangechi Mutu.

Tracey Rose, est née en 1974 en Afrique du Sud. Elle est métisse, et en tant que telle, elle a pu être scolarisée avec des filles blanches, mais elle dit y voir surtout appris qu’elle n’est ni noire ni blanche. Elle a étudié l’art à l’université de Johannesburg jusqu’en 1996, et l’apartheid a été aboli en 1994. Elle réaliste des performances provocatrices et ironiques justement pour faire table rase de l’apartheid.


Tracey Rose the kiss (2001)
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The kiss, montre un homme noir qui enlace une femme blanche dans la position du baiser de Rodin

Span 1 Span 2 nue et rasée, en vitrine dans une cage de verre, elle tricote les poils et les cheveux de son corps, assise sur une télévision diffusant une image d’odalisque et des témoignages audio de métisses 1997.


Tracey Rose Ciao Bella, Ms Cast, Venus Baartman, (2001)
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Ciao Bella, Ms Cast, Venus Baartman, 2001 Tracey Rose, joue avec les notions d’identité personnelle et nationale dans son travail. Ici, elle adopte le rôle de Saartjie Baartman, la célèbre Vénus Hottentote, qui fut exhibée – et ridiculisée – à Paris et à Londres comme une curiosité scientifique au début du XIXe siècle (hypertrophie des hanches et des fesses). S’utilisant elle-même comme sujet principal, son travail commente le colonialisme et le racisme dans l’art occidental.

Omar Victor Diop né en 1980 au Sénégal, il vit et travaille à Dakar. Révélé aux rencontres de Bamako en 2011, il s’inspire d’abord des photos de mode occidentales. Il est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Paris. Dans une première série intitulée le futur du beau, il détourne les biens de consommation ordinaire pour en vêtir ses modèles.


Omar Victor Diop, studio des vanités Aminata Faye(2013)
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Puis en 2013, dans la série studio des vanités, il dresse le portrait d’une génération de noirs créatifs, ambitieux, urbains et très attachés à la mode.

En 2014, avec la série « diaspora », il se met en scène lui-même rejouant des portraits de notables africains de la diaspora qui ont marqué l’histoire.


Omar Victor Diop, série diaspora, Frederick Douglass (2013)
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Frederick Douglass (1818-1895), réformateur social info américain, échappé de l’esclavage au Marriland en 1938, est devenu l’un des leaders abolitionniste, il a été le premier vice-président noir des États-Unis et il militait pour le suffrage des femmes.

Voir également :
Représentation de Angelo Soliman, enlevé enfant dans l’actuelle Nigeria, amené en Europe comme esclave, domestique, il devient le mathématicien-philosophe confident de l’empereur d’Autriche Joseph II, de Mozart et de Hayden. Après sa mort en 1796, il fut empaillé et sa dépouille décora le salon impérial jusqu’en 1848. En affublant ses personnages d’objets liés au foot, il enlève une charge dramatique et rappelle qu’aujourd’hui le ballon rond sert de passeport. Voir sa bibliographie.
Dom Nicolau, prince du Congo entre 1842 et 1857, fut le premier leader africain à s’être ouvertement opposé aux influences coloniales à travers une lettre publiée dans un journal de Lisbonne, où il critique la soif d’expansion des Portugais, et leurs activités économiques et politiques. Voir sa biographie.
Jean-Baptiste Belley (1746-1805) est un révolutionnaire français membre de la Convention nationale et du Conseil des Cinq-Cents. Voir sa biographie.
Voir interview de Omar Victor Diop