Art et nature (saison 1)

Christo né en 1935, est le seul de cette génération de Land artistes à apporter une solution personnelle à la question évoquée précédemment, du financement de chacune de ses entreprises. C’est la vente d’oeuvres originales, dessins, lithographies, collages, directement liés au projet qui lui garantit la liberté dont il a besoin. Il considère d’ailleurs que tout le travail de négociation, d’obtention des autorisations, les contrats avec les entreprises, le montage, et la médiation font partie intégrante de son travail artistique.


Christo et Jeanne-Claude – Valley Curtain (1970-71)
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Valley curtain (1970-1972) est une « œuvre d’art temporaire » de 28 heures pour une préparation de 28 mois. Un rideau 111 mètres à 417 mètres de haut suspendu par cinq cables d’acier vient fermer la vallée.


Christo et Jeanne-Claude – Surrounded islands Biscayne Bay (1980-83)
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Surrounded Island (1980 à 1983). Ce sont les îles de la baie de Biscayne à Miami, qu’ils avaient entouré d’une ceinture rose fuchsia pour deux semaines : 11 îlots, qui servaient surtout de décharge à ordures (que Christo a fait retirer à ses frais). Le résultat transforme radicalement le paysage.

Land Art les marcheurs solitaires

Loin du gigantisme et de la brutalité des interventions prométhéenne de ces pionniers américains, d’autres artistes entretiennent avec le paysage, une relation durable, plus douce travaillant non plus dans la nature, mais avec la nature. Ce sont des artistes européens, souvent des Anglais, et ils travaillent seuls sans assistant.

Richard Long né en 1945 est l’un de ces artistes marcheurs.


Richard Long – A line made by walking (1967)
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A line made by walking : sur un pré uniformément fleuri, la photo montre une ligne plus claire, droite, perpendiculaire au plan de l’image. Un geste simple, comme un manifeste de son travail à venir. Long a alors 22 ans, il est étudiant à La Saint Martin school (condisciple de Gilbert et George). Le corps seul a servi d’instrument, sans aucun accessoire, quelques pas dans un pré dont la photo restitue la trace. Par la suite, l’artiste étendra à toutes ses interventions le même principe. On ne le voit pas marcher, il utilise exclusivement le matériel offert par la nature sur place ajoutant parfois un outillage léger, un pieu, ou une corde pour tracer des cercles.
Et puis après l’Angleterre, il a fait des marches en Irlande (1982) en Laponie (1988) et au Népal (1985). En savoir plus.


Les marches de Richard Long

A walk of four hours and four circles (1972) il s’est fixé pour objectif de parcourir chacun des 4 cercles concentriques en une heure (la variable est donc l’allure de la marche donc une réceptivité plus ou moins vive à l’environnement).

Dans les espaces muséaux, des cartes, des photos rendent compte de ses marches, et il réinstalle sur les sols de parquet ou de béton les matériaux rapportés, disposés selon les mêmes modalités géométriques que lors de l’intervention in situ. A cela, depuis quelques années, s’ajoutent des peintures de boue … qui avaient été très remarquées dans l’exposition historique les Magiciens de la Terre en 1989 organisée par Jean-Hubert Martin, car confrontées à des peintures de sable d’indiens dont la vocation est rituelle et magique.

Voir Richard Long au CAPC de Bordeaux.

Andy Goldsworthy né en 1956, est anglais lui aussi. Il a grandi dans une ferme, et entretient depuis toujours une relation passionnelle avec la nature. Son oeuvre, extrêmement raffinée n’est médiatisée que par des photographies, il n’emporte ni matériaux, ni instruments, il agrafe et assemble des éléments avec des épines, des tuyaux de plumes, parfois avec sa salive. Et lui aussi explore le monde entier. Un geste simple a marqué son entrée sur la scène artistique, une photo : allongé jusqu’à ce qu’il pleuve ou neige (1988). Il a attendu que le sol soit mouillé ou couvert de neige pour se lever.


Andy Goldsworthy – Feuilles d’iris et baies de sorbier (1987)
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Voir également :
Feuilles d’érable et flaque d’eau.
Feuilles de sorbier disposées autour d’un trou.

Voir d’autres oeuvres d’Andy Goldworthy

Il déclare « je suis attiré par la beauté comme un arbre par la lumière« .

Nils Udo est allemand, il est né en 1937, et avait d’abord été peintre en Bavière. Comme Goldswothy, il se promène dans la nature, sans idée préconçue, et improvise sur place de fragiles assemblages. Sa première idée en 1978, était un nid de branchages, un nid géant dans lequel il s’était lové, le temps d’une photo.


Nils Udo – Nid (1978) Bavière
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Depuis il a réalisé beaucoup de nids, dont celui d’œufs géants en marbre qui est dans les jardins de la fondation Carmignac.

Mais c’est aussi un coloriste, qui utilise des fleurs, des feuilles d’arbre, à des fins poétiques, qu’il aime laisser dériver au fil de l’eau. Là encore, seule la photographie témoigne de ce moment de beauté.


Nils Udo – Radeau d’automne (2015)
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Il y a 4 ans, il a réalisé le radeau d’automne en bois de châtaignier, qui a la forme d’une demi feuille stylisée d’érable (c’est le reflet dans l’eau qui complète la forme). L’ensemble mesure 6,80 m de long et 3,90 m de haut. Il le photographie dans différents contextes. Par ailleurs, depuis 2004, il a repris des pinceaux et expose des peintures à l’huile sur toile.

Voir d’autres oeuvres de Nils Udo.

Wolfgang Laib né en 1950 en Allemagne peut lui aussi être associé au Land Art, et au minimal art, mais son travail est lié aux philosophies orientales. Après des études de médecine Laib fait une thèse sur l’hygiène de l’eau potable, qui l’a conduit à passer 6 mois en Inde du sud. Depuis il a étudié le sanskrit l’hindi, et le tamoul … (nous avons parlé de lui dans la conférence sur les couleurs à propos du jaune). Son travail est d’une lenteur méditative, ascétique. Depuis 1977 il récolte en mai du pollen de noisetiers, puis de pissenlits. Il utilise ses doigts pour prélever le pollen et le mettre dans le grand bocaux. Jamais il ne délègue ce travail, à quelqu’un d’autre.Ce travail a justement une fonction purificatrice.
Guy Tosatto écrit : »L’artiste n’est plus rien d’autre que ce qu’il fait, pourquoi il l’a fait. Il devient cette conscience éveillée, cet être lumineux, ouvert à tous les phénomènes de la nature qui, dans un échange silencieux, entame avec elle un dialogue serein. »
L’analogie avec les pigments des peintres est saisissante, comme s’il y avait là l’idée d’une peinture absente (cf Rothko).


Wolfgang Laib, Pollen de noisetier | MoMA


Wolfgang Laib – Pierre de lait (1977)
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Les pierres de lait ou Pierre à lait sont un autre aspect de son travail, depuis 1977. Il s’agit de marbre blanc de Carrare, des plaques de surface variable, meulées manuellement par l’artiste sur la face supérieure de façon à présenter une légère concavité, sont ensuite remplies de lait jusqu’à la reconstitution du volume initial. Là encore aucun assistant. Quotidiennement vidées, les pierres sont nettoyées, puis à nouveau remplies de lait jusqu’à reconstitution du volume. Rigueur abstraite de cette étrange rencontre, de la pierre noble, dure, inaltérable et du lait liquide, putrescible, les deux substances n’ayant en commun que leur blancheur et leur éclat.
Voir un commentaire (centre Pompidou)

Nous avons ouvert avec l’histoire de l’art plusieurs pistes de réflexion : le jardin Paradis comme refuge (Monet, Bonnard), la forêt comme lieu mystérieux, onirique (Max Ernst), la terre nourricière origine de toute vie (Dubuffet), les land-artistes qui ont fait de la nature un support pour des œuvres à l’échelle de Stonehenge et des signes de Nazca, d’autres ont exalté la fragilité et la caractère éphémère de toutes les beautés naturelles.
Nous verrons que des artistes contemporains réinterprètent ces postures autrement, mais aussi que l’inquiétude face aux dégâts bien connus que subit notre environment génère des oeuvres différentes comme des signaux d’alerte.