Cours du 10 novembre 2012

En octobre 1912, il expose au Salon de la Section d’0r. Il décide de renoncer à la peinture et accepte un emploi à la bibliothèque Sainte Geneviève, il a beaucoup de temps libre pour étudier des ouvrages de mathématiques et de physique (ouvrages de Poincarré notamment). En févier 1915, à New York, s’ouvre l’Armory Show : les peintures de Duchamp y remportent un succès considérable et le peintre devient bientôt célèbre en Amérique.


Marcel Duchamp – 3 stoppages-étallon (1912) Philadelphie, Musée des Beaux-Arts
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3 stoppages-étallon. Boite contenant du hasard. II a posé au sol une toile peinte bleu de Prusse. Il a pris un fil blanc de 1 m, il a tendu le fil à 1 m au dessus de la toile et il l’a laissé tomber sur la toile. Il a répété l’opération 3 fois. A partir des traces des fils sur la toile, il demande à un artisan d’en faire des règles. Il est son propre « maître », « c’est du hasard en conserve ». Extrême intelligence mais extrême facilité. Il utilisera ces trois règles dans ses oeuvres futures
Jeu sur la règle et le hasard. Voir un commentaire.


Marcel Duchamp – Broyeuse de chocolat (1913) Philadelphie, Musée des Beaux-Arts
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En 1913, broyeuse de chocolat. Inspiré d’une machine servant à broyer le cacao. Voir un commentaire.
Les fils blanc sont cousus dans la toile. Il est délivré de la camisole cubiste, c’est un objet banal, on arrive à une déconstruction complète du concept d’oeuvre d’art.

Glissière contenant un moulin à eau (en métaux voisins). (1915)
Réalisé avec du fil de plomb. Il écrase à plat une image en perspective.


Marcel Duchamp – Neufs moules maliques (1913) Philadelphie, Musée des Beaux-Arts
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Neufs moules maliques. Réalisé sur du verre avec du fil de cuivre. Ces moules sont des objets qui permettent en les coulant de fabriquer des uniformes. Ces éléments seront repris plus tard dans la célèbre Mariée mise à nu par ses célibataires même. Les Neuf moules maliques représentent les célibataires : le gendarme, le cuirassier, l’agent de la paix, le prêtre, le chasseur de café, le livreur de grand magasin, le larbin, le croque-mort et le chef de gare.

Les ready-made


Marcel Duchamp – Roue de bicyclette (1913) Philadelphie, Musée des Beaux-Arts
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1913 roue de bicyclette. La roue comme une sculpture en mouvement. Composée de métal et bois peint, il s’agit d’une roue de bicyclette (sans pneu) fixée par sa fourche sur un tabouret en bois.
Utilisant des objets manufacturés, il a créé ainsi le premier ready-made, dans une approche qui consiste à détourner des objets manufacturés pour en faire des œuvres d’art, ce qui a donné naissance à nombre de démarches artistiques actuelles.
Sa deuxième œuvre ready-made sera le Porte-bouteilles, acheté au BHV de Paris. Cet objet à la fois féminin et phallique d’après Duchamp, est une sculpture comme une autre.

Il part aux Etats Unis en 1915 où il est célèbre. Il est pris en charge par des mécènes (la famille Arensberg). Il commence alors à travailler sur le grand verre.
Alors qu’il était très réservé en France, il devient aux Etats Unis un dandy, il se lie avec des personnages importants (Man Ray), Katerine Dreier. Il travaille 2 h par jour pour son projet sur des plaques de verre « le grand verre ». Il continue à réfléchir à la fabrication d’objets les ready-made.

A bruit secret (pelote de ficelles contenant un objet qui n’est pas visible). Voir un commentaire.
1916 pliant de voyage (référence à sa maîtresse de l’époque, Beatrice Wood).

1917 création de la société des artistes indépendants, organisation d’une grande exposition sur l’évolution des artistes new-yorkais. L’objectif est de montrer tous les types de pratique, sans aucune censure.


Marcel Duchamp – Fontaine (1919)
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La Fontaine est le plus célèbre des ready-mades de Duchamp. Elle a donné lieu à un grand nombre d’interprétations et d’écrits, parmi lesquels ceux de spécialistes de l’esthétique qui s’interrogent sur la redéfinition de l’art qu’elle implique.
A l’origine Duchamp achète cet objet, un urinoir ordinaire, pour l’envoyer au comité de sélection d’une exposition dont les organisateurs s’engagent à exposer n’importe quelle œuvre dès lors que son auteur participe aux frais. Faisant lui-même partie de ce comité organisateur, il souhaite éprouver la générosité de son principe.
Une fois l’objet acquis, Duchamp le retourne, lui donne le titre poétique de Fontaine et le signe Richard Mutt, en parodiant le nom du propriétaire d’une grande fabrique d’équipement. Avec un titre et un auteur, l’objet possède toutes les qualités extrinsèques d’une œuvre d’art. Mais il se voit refusé par le comité de sélection.
Pour l’inauguration de l’exposition, Duchamp demande à l’un de ses amis, riche collectionneur, de réclamer la Fontaine de Richard Mutt. L’œuvre n’étant pas exposée, celui-ci fait scandale et prétend même vouloir l’acheter. C’est ainsi que, peu à peu, l’histoire de la Fontaine prend de l’ampleur.
Suite à l’exposition, Duchamp fait paraître une série d’articles sous le titre « The Richard Mutt case ». C’est l’occasion pour lui d’écrire des propos parmi les plus révolutionnaires et pertinents sur l’art, et de répondre à l’accusation de plagiat : « Que Richard Mutt ait fabriqué cette fontaine avec ses propres mains, cela n’a aucune importance, il l’a choisie. Il a pris un article ordinaire de la vie, il l’a placé de manière à ce que sa signification d’usage disparaisse sous le nouveau titre et le nouveau point de vue, il a créé une nouvelle pensée pour cet objet ».
Selon Duchamp, l’artiste n’est pas un bricoleur et, dans l’art, l’idée prévaut sur la création. Cette conception rejoint celle des grands artistes de la Renaissance qui ont élevé la peinture au rang des arts libéraux – telles l’astronomie et les mathématiques – et en particulier Léonard de Vinci qui définissait l’art comme « cosa mentale ».
Toutefois, Duchamp s’en différencie en ce qu’il propose un objet qui n’a aucune des qualités intrinsèques que l’on suppose à une œuvre d’art, comme l’harmonie ou l’élégance. Son objet n’a que les signes extérieurs d’une œuvre, il obéit à une définition positive, voire à un « nominalisme » de l’art.

Voir un commentaire.

1918 sculpture de voyage. Cette sculpture pour Voyager incarne la notion de souvenir .


Marcel Duchamp – Tu m’ (1919)
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En 1918 Katherine Dreier lui supplie de faire une toile. Il réalise tu m’.
Déchirure de la toile, voir un commentaire.

De passage à Paris, il laisse à ses amis dadaïstes une reproduction de la Joconde sur laquelle il griffonne moustaches et barbiche et dont il localise la température par le fameux allographe : L.H.O.O.Q. Voir un commentaire. (Ready made aidé).

Air de Paris ampoule de sérum contenant de l’air de paris. Voir un commentaire.

Il regagne New York en 1920, travail à nouveau sur le grand verre. Man Ray photographie la poussière (voir également élevage de poussières).

Rotatives, plaques verre en 1920.

Il se crée un alter ego féminin Rrose Selavy.
Elle produit des mots d’esprit (voir) et des ready made (Fresh widow, belle Haleine, ou eau de voilette).


Rrose Selavy – Pourquoi ne pas éternuer (1921)
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1921 autre ready made. Pourquoi ne pas éternuer Rrose Selavy. Cage d’oiseau avec 150 morceaux de marbre, poème de Gertrude Stein.
Il s’agit d’une oeuvre de commande. Katherine Dreier, demande à l’artiste un objet qu’elle veut offrir à sa soeur. Marcel Duchamp assemble une composition qui laissera tous ses contemporains perplexes (La soeur de Katherine, Dorothéa, n’en voulut d’ailleurs pas, Katherine garda l’objet dans sa collection jusqu’en 1937 pour le revendre, sans profit, à Walter Arensberg, l’autre grand mècène de l’artiste.)
Il s’agit une cage d’oiseau remplie apparemment de morceaux de sucre d’un blanc immaculé, un thermomètre fiché dans le monticule en mesure la chaleur et fait face à un os de sèche de l’autre coté de la cage…
Le titre sonne comme une proposition, un conseil, une recommandation chaleureuse et amicale faite sur le mode interrogatif, « Pourquoi ne pas éternuer ? »
Mais qu’est-ce qu’éternuer ? C’est s’autoriser une implosion cathartique. L’ éternuement est la conséquence naturelle d’une irritation, une tension qui monte dans le corps et se déchaîne soudainement en ne laissant que la trace d’un écoulement… Dans la composition « Pourquoi ne pas éternuer ? », les morceaux de sucre qui connotent le plaisir de la gourmandise et le suc de la vie se révèlent, dès qu’on veut soulever la cage, des blocs de marbre froid. Cette cage est sans oiseau, sans vie : l’os de sèche étant justement ce qui reste de l’animal vivant quand la sèche s’est desséchée…Mais l’os est destiné à être consommé, c’est la nourriture terrestre de l’oiseau !

Une fois de plus Marcel Duchamp joue avec les représentations codées pour signifier l’ordre du corps, la logique du désir et la mécanique des pulsions comme il le fera tout au long de sa vie.

En 1921 tonsure en forme de comète. Voir l’écrit de 1912.

En 1923 le grand verre est définitivement inachevé.


Marcel Duchamp – Grand verre (1923) – La marié mise a nu par ses célibataires même – Philadelphia Museum of Art
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Grand verre est une oeuvre en 3D. Il pense que l’art est lié à son lieu d’exposition. L’oeuvre qui est transparente permet de voir également le musée. Elle n’a de sens qu’avec le regardeur. C’est un « tableau hilarant ».
Elle fut réalisée entre 1915 et 1923 à New York elle est composée de deux panneaux de verre assemblés, peints pour partie à l’huile, et comprenant des inserts en plomb, de la poussière, etc. Elle fut brisée involontairement quelques années plus tard puis reconstituée.
Marcel Duchamp arrêta de travailler sur Le Grand Verre en 1923. L’œuvre est considérée comme inachevée, selon le vœu même de l’artiste, qui laissa cependant des notes.
Voir un commentaire. Voir une autre description de l’oeuvre.
La marié mise a nu par ses célibataires même voir la boite verte.
Grand verre décryptage
– A gauche les neufs moules mâles dessinés en perspective, peints avec du minium (couleur de l’attente). Des tubes se dirigent des moules vers le centre du verre.
– La broyeuse de chocolat car un célibataire broie son chocolat lui même.
– A droite témoins oculistes réalisé par étamage.
– La partie féminine en haut envoie un signal amoureux à la partie inférieure.
– En haut la mariée est un moteur à explosion.
Première interprétation dans le phare de la mariée (1935) par A. Breton. Il considère que « Duchamp était l’artiste le plus intelligent et dérangeant de son temps ». Voir un commentaire.

Depuis cette époque, il se consacre principalement aux échecs.