Gloria Friedmann, allemande née en 1950, vit en France depuis 1977. Elle est dessinatrice, peintre, mais surtout sculpteur et parfois vidéaste. Elle utilise souvent les animaux pour dénoncer les comportements humains. Ainsi son célèbre cerf qui brame sur un socle compact de journaux s’intitule « envoyé spécial » et il dénonce les dégâts dans les forêts qu’engendre la fabrication du papier.
Dans ses tableaux vivants, elle met en scène des joueurs d’échec inconscients au pied d’une centrale nucléaire, à côté de dindons fripés et mal en point et des danses folkloriques bavaroises dans un champ où les vaches sont marquées de noms évoquant la finance. « money make the world go round »
Parmi ses sculptures en terre, « le gardien », est une gigantesque tête d’homme surmontée d’une énorme couronne de cervidés, l’homme devrait en effet être le gardien de la faune et non son prédateur.

Gloria Friedmann Le gardien 2013, sculpture en terre 10 m de haut forêt régionale de Rougeau, en Île-de-France
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« Le Locataire » est une œuvre sculpturale symbolique qui questionne la place humaine dans la nature, la fragilité de notre domination et invite à une réflexion écologique et existentielle portée par une approche artistique alliant observation, ironie et émotion.
Combien de terre faut-il à l’homme ?
Gloria Friedmann Combien de terre faut-il à l’homme ?
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et récemment au moment de l’invasion de l’Ukraine par les Russes, elle a réalisé cette installation, un très grand missile sous lequel cherchent à s’abriter un ensemble d’animaux, ou qui va s’abattre sur eux et les écraser.
de façon poétique, métaphorique et sensible, Friedmann donne à réfléchir sur la responsabilité des hommes.
Vaughn Bell, artiste américaine, pense aux citadins qui sont éloignés de tout espace vert et leur propose de passer leur tête à travers un trou, aménagé dans des serres suspendues, et offre une expérience sensorielle qui consiste à observer de très près de petits écosystèmes de plantes et d’insectes.
Minerva Cuevas est une artiste mexicaine née en 1975. En 2015, elle a peint une série de paysages qu’elle a trempé ensuite dans un épais mélange à base de goudron et d’hydrocarbures. Plus récemment, une grande fresque intitulée « Dark matter » (matière noire) montre des animaux qui tentent de s’adapter à un monde pollué par l’industrie pétrolière. Devant, trempant dans des bidons d’huile pour moteur quelques plantes…
En 2022-2023, « The Trust » est un bas relief peint en blanc qui associe les divinités Aztèques, (la déesse de l’eau de la fertilité et celle de la luxure et du vice) à des logos d’entreprises : le Pégase de Mobil-oil, les hachures superposées de Bank of America, le rayon de soleil fleuri de BP etc… L’artiste assimile les grandes firmes financières et pétrolières à des dieux qui assurent la fertilité du capitalisme et qui, comme tous les dieux s’alimentent de sacrifices, les nôtres, qui par notre avidité consumériste, leur donnons vie.
Les figures mythologiques aztèques placées sur d’anciens barils de pétrole révèlent aussi la continuité de l’exploitation des ressources naturelles et des systèmes de pouvoir coloniaux à travers le temps.
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Michael Pinsky, artiste écossais né en 1964, s’appuie sur les prédictions de la NASA sur l’élévation du niveau de la mer causé par le réchauffement climatique.
L’artiste encercle les monuments mythiques de Londres et de Paris de filets de lumière bleue, correspondant au niveau des eaux en l’an 3111. Il transforme ainsi, de façon esthétique et élégante, une notion abstraite en réalité tangible. Les lumières de ces jauges se veulent un signal qu’il est encore temps d’agir.
Voir à Paris.
Par ailleurs, toujours en lien avec les données scientifiques, il a réalisé des « Capsules de pollution » (pollution pod) composées de 5 dômes géodésiques interconnectés qui reproduisent les différents niveaux de pollution trouvés à Londres, New Delhi, Sao Paulo, et Pékin. Les visiteurs embarquent pour un voyage partant d’un cadre côtier en Norvège et traversent une série de cellules dont la pollution s’intensifie progressivement, passant d’un environnement sec et froid à des conditions chaudes et humides. Cette œuvre fait partie du programme de recherche climat qui s’interroge sur l’impact de l’art en matière de climat réchauffement climatique.
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Michael Pinsky en 2015 pendant la COP21, a exposé à Paris le long du canal de l’Ourcq, tous les objets domestiques qui avaient été jetés : des fours, des caddies, des frigos chacun éclairé par une lumière bleue. « L’eau qui dort » une quarantaine de pièces flottantes de part et d’autre des deux rives. Les gens utilisent les canaux comme réceptacle des encombrants. Ce sont des plongeurs du service des canaux de Paris qui sont allés chercher ces épaves domestiques.

Michael Pinsky L’eau qui dort, canal de l’Ourcq, La Villette, 2015
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Andrea Polli, artiste américaine née en 1967. En 2011 elle a réalisé Breather, une Fiat 500 en fonctionnement a été exposée dans un espace public sur un podium bâché de plastique, comme un respirateur d’hôpital grand format. Les émissions de gaz toxiques du véhicule étaient ainsi rendus visibles.
En 2016 « Particle Falls » (chute de particules) a été une visualisation à grande échelle et en temps réel de données sur la qualité de l’air. L’installation lumineuse a été projetée sur le mur d’un théâtre à Philadelphie puis à San josé en Californie. Des taches de couleur vive crépitent, représentant la présence de fines particules détectées par un moniteur d’air à proximité. Le but est d’attirer l’attention sur les particules invisibles qui peuvent affecter notre santé.
Voir d’autres oeuvres d’Andrea Polli.
L’artiste chinois Chiu-Chih né en 1990 met à notre disposition un « Survival kit », un système portatif de respirateur faisant transiter l’air inhalé à travers des plantes servant de filtre. L’artiste est un designer, qui a étudié le design industriel. Avec Voyage on the planet il s’est filmé lors d’une journée polluée en Chine, envoyant un message inquiétant sur la dégradation de l’environnement. Il est titulaire d’un master en innovation ingénierie du Royal Collège of art de Londres.
Christiane Geoffroy, artiste française, est fascinée par la biologie et toutes les formes de vie naturelles. Elle a filmé un animal rare, le clione-limacina, minuscule poisson du fond des mers, devenant bleu et transparent lorsqu’on l’éclaire, qui donne dès qu’il s’ébroue, l’impression d’être un ange touchant de fragilité et de grâce. Elle dit « j’ai choisi l’ange des mers comme emblème poétique de la lutte contre l’acidification des océans« . Ces minuscules formes de vie sont directement affectées par l’acidification des océans.
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Elle présente un planisphère où les terres sont dilatées en fonction du bilan carbone de chaque continent. C’est éloquent, expansion maximale de l’Europe et de l’Amérique du Nord, minimale de l’Afrique et de l’Océanie.
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D’une façon moins subtile mais spectaculaire, H.A. Schult artiste allemand, a créé un peuple de personnages composé de déchets, d’objets de rebut. Il les expose un peu partout en foule, particulièrement dans des lieux réputés pour leur beauté.
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Le réchauffement des mers préoccupe le collectif d’artistes belges d’Anvers qui se fait appeler Captain boomer. C’est grâce à eux que les Bordelais ont eu un jour la duperie de découvrir une baleine échouée en 2014. « Whale » est la sculpture hyperréaliste d’un cachalot de 18 mètres de long.
Sa présentation s’accompagne d’une mise en scène extrêmement vraisemblable où des personnages en combinaison sanitaire s’affairent autour d’elle dans le but de sensibiliser le grand public au danger de disparition que courent nombre d’espèces marines.
La baleine Capitain Boomer à Paris
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Otobong Nkanga artiste nigérienne née en 1974 vit à Anvers, avait été primée à la biennale de Venise en 2019 pour cette grande ligne sinueuse de 26 m de long en marbre percée d’une ligne en verre de Murano, qui évoquait une rivière dont les eaux sont polluées par l’exploitation abusive des matières premières. La couleur du verre de Murano s’assombrit peu à peu.
Otobong Nkanga Veins aligned, Biennale de Venise 2019
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Avec « The Weight of scars » en 2015 (le poids des cicatrices), œuvre textile tissée sur laquelle sont aimantées 10 photographies. De chaque côté deux silhouettes sans tête manient des cordes qui relient l’une à l’autre dix photographies de mines abandonnées en Namibie. Elle évoque la mécanisation du corps humain dans les chaînes de production propres au capitalisme et la déshumanisation qui en découle. Elle dresse ainsi un réseau de cicatrices, une cartographie historique et affective de l’Afrique dont les ressources minières sont surexploitées.

Otobong Nkanga The Weight of scars 2015 Oeuvre textile 253 x 612 x 3 cm Centre Pompidou
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C’est elle qui avait réalisé cette très grande tapisserie que nous avions vue dans le pavillon ukrainien de la Biennale de Venise en 2024. Il s’agissait d’un paysage surchauffé dans lequel était fixées ça et là de jeunes plantes. Nous n’avions pas compris la technique de tissage, j’ai appris que cette tapisserie avait été réalisée en grande partie par un métier à tisser numérique. L’artiste accompagne l’accrochage de ses tapisseries par des éléments au sol : des plantes emprisonnées dans du verre parfois du sable, ou des branches. Les jeunes plantes ici indiquaient que la vie renaît toujours.
Installation de l’œuvre « Unearthed – Sunlight » (2021) d’Otobong Nkanga, présentée lors de son exposition KUB 2021.04 Otobong Nkanga au Kunsthaus Bregenz en Autriche.
Le sol de la galerie est recouvert de terre crue (argile et limon) et d’eau/boue, créant un paysage intérieur qui se fissure et se craquelle en séchant. Cela rappelle la matière minérale et l’exploitation des sols.
Le tronc d’arbre rabougri ou calciné qui émerge du sol symbolise le lien structurel entre les quatre étages de l’exposition. Il traverse l’espace verticalement, allant des profondeurs de la terre et de l’océan (étage Abyss) jusqu’à la lumière intense (Sunlight).
Brandon Ballanger, artiste et biologiste américain né en 1974 expose depuis les années 2000 expose en photographie les images radiographiées des batraciens ayant muté auxquels manquent des fragments de corps ou au contraire dotés de membres supplémentaires. C’est l’effet de la pollution des eaux humides de Californie où l’artiste les a trouvés.
La marée noire de British petroleum deepwater horizon en 2010 est considérée comme la plus grande catastrophe environnementale de l’histoire des États-Unis. 3 mois après l’explosion et le naufrage de la plateforme pétrolière qui a coûté la vie à 11 travailleurs, le puits a été bouché mais 206 millions de gallons de pétrole s’étaient déversés dans le golfe du Mexique, éradiquant d’innombrables animaux marins.
Avec collapse en 2012, il montre une pyramide de 4 m de haut faite de bocaux empilés contenant 370 espèces protégées et 26 162 spécimens préservées, des formes de vie les plus simples en bas comme un arthropode, aux formes plus complexe au sommet (un très jeune requin). Dans certains bocaux, il a intégré un peu de pétrole et de Corexit, un solvant-puissant utilisé pour la collecte des pétrole bitumineux. Quelques bocaux vides indiquent les espèces aujourd’hui disparues.
Les bocaux de Bellanger ont la taille d’un gallon (3,785 l).
Lucy + Jorge Orta un duo d’artistes militants. En 1990 ils sont partis pendant un mois étudier la biodiversité en Amazonie. En 2007 ils ont séjourné 3 semaines en Antarctique. En tout ils ont réalisé 43 expositions-actions et ont reçu le green leaf award offert par le programme environnemental des nations unies.
En 2014, « Symphonie pour faune absente » 20 musiciens vêtus de costumes de feutre à queue de pie et d’un masque sculpté représentant un animal en voie de disparition, interprètent une symphonie de chants d’oiseaux avec des appeaux en bois sculpté. La performance se termine brusquement en plongeant les interprètes dans le noir et le silence.
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Pour clore cet inventaire des artistes qui dénoncent, ou sensibilisent il faut évoquer la polémique suscitée par Ólafur Eliasson, lorsque pendant la COP21 en 2015, à Paris il a installé devant le Panthéon d’énormes blocs de glace transportés depuis le Groenland où ils avaient été recueillis par des dockers et des plongeurs de la Royal Artic line : 12 blocs de glace étaient positionnés en cercle pour former un cadran, (l’horloge du réchauffement climatique).

Ólafur Eliasson Ice Watch, place du Panthéon, Paris décembre 2015
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Les blocs pesaient au total 100 tonnes, ce qui correspond au volume de glace qui fond chaque centième de seconde dans le monde. Or si l’opération a été d’une efficacité symbolique incontestable, des voix se sont élevées pour faire remarquer que l’opération d’extraction et de transport avait dégagé 30 tonnes de CO2. Une œuvre écologique devrait-elle s’imposer la sobriété des moyens ? la question reste ouverte.
Alors « Che fare ? » (comment faire ?) comme l’écrivait Mario Merz artiste du groupe Arte powera dès 1968. Il avait donné ce titre à une exposition mêlant sa vieille voiture éclairée par un néon et un igloo assemblé en terre glaise.
L’expression « Que faire ? » est directement tirée du titre d’un célèbre pamphlet politique écrit par le révolutionnaire russe Vladimir Lénine en 1902.
En 2014, même la publicité, fair écho à notre inquiétude environnementale.
Voir les pubs de Terry Richardson pour Diesel.
4 – Réparer, restaurer les écosystèmes
Dès 1992, de façon très simple, l’américaine Kathryn Miller avait mis au point « Seed Bombing », 1969 (bombe à graines) : en utilisant comme des grenades d’assaut des petits sacs remplis de graines diverses, elle avait entrepris de reconstituer un peu partout la végétation naturelle.



































